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Chroniques
Hans Werner Henze
L’Upupa | La Huppe
L'Upupa und der Triomph der Sohnesliebe (La Huppe et le triomphe de l'amour filial) est, ainsi que nous l'apprend le livret, une comédie allemande en onze tableaux tirés de l'arabe. Sans doute le dernier de Hans Werner Henze – du propre aveu du musicien qui approche les quatre-vingt ans –, cet opéra vient s'ajouter à la douzaine d'ouvrages conçus pour la scène depuis un demi-siècle : Boulevard Solitude (1951), König Hirsch (1955), Der Prinz von Homburg (1960), The English Cat (1983), etc. Il a été créé à Salzburg, présenté du 12 au 26 août 2003 au Kleines Festspielhaus, dans une mise en scène sans reproche de Dieter Dorn.
À la fois fable complexe et conte initiatique, L'Upupa nous invite à suivre Al Kasim, jeune homme dont la vertu brille comme l'étoile du soir, dans sa quête. Il doit retrouver une huppe femelle échappée des appartements de son vieux père, lequel a envoyé ses trois fils à sa recherche. Seul le cadet, brave et candide, affrontera des dangers successifs, tandis que l'aîné, le menteur Gharib, et le puîné, Adschib le scandaleux, attendront sans vergogne le retour de leur frère victorieux. Ils le jetteront alors dans un puits et, pensant être débarrassé de lui à jamais, vont recueillir les lauriers paternels.
Nul besoin d'en dire plus si l'on veut faire partager le plaisir éprouvé devant cette féerie qui, par bien des aspects, évoque Die Zauberflöte (rencontre de mondes mystérieux, épreuves, délivrance d'une jeune captive, etc.). Henze s'est senti très proche de Mozart durant la composition de l'œuvre, et l'usage des vents en garde la trace – surtout la clarinette, tandis que la trompette et le violon évoquent Stravinsky. Le décor de Jürgen Rose participe également au merveilleux, et s'il fait place à quelques fleurs géantes, il évite toute surcharge, préférant une belle épure à la tentation du foisonnement. Le livret du compositeur est plein de malice ; qui oserait mettre en garde un héros en lui rappelant : « Garde-toi des fantômes, des nudistes, des trolls sauvages et des trappistes » ?
Dans le rôle du Vieil Homme qui « se consume pour cet esprit angélique », Alfred Muff impose sa présence d'une voix idéale pour le Sprechgesang. Anton Scharinger (Gharib), Axel Kölher (Adschib), Laura Aikin (Badia'at) et Hanna Schwarz (Malik) sont excellents. Seul déçoit Matthias Goerne dans le rôle principal – pas de ligne de chant, émission sourde et sans éclat –, mais cette unique faiblesse de la distribution est compensée par la présence charismatique de John Mark Ainsley, bien meilleur comédien, et doté d'une belle voix puissante, qui incarne un Démon plein de subtilité. Le Wiener Philharmoniker est avantageusement dirigé par le toujours précis Markus Stenz.
LB